Le cycle de l'azote
L’élimination de l’azote fait partie des étapes essentielles du traitement des eaux usées. Il existe d’ailleurs des normes réglementaires liées aux concentrations de l‘azote en sortie de station dans de nombreux pays. De ce fait, pour respecter ces concentrations, il faut contrôler la nitrification et la dénitrification de manière optimale.
Dans les eaux, l’azote peut se trouver sous forme minéral (ammoniacal, nitrate) ou organique. Sa présence organique ou ammoniacal se traduit par une consommation d’oxygène dans le milieu naturel et altère les conditions de vie.
En assainissement, le cycle de l’azote passe par les différents stades d’évolution biogéochimique du composé. Il aboutit à la formation d’azote gazeux (diazote N2) en commençant par l’azote organique, et en passant par : l’ammoniac, le nitrite, le nitrate.
Dans les stations d’épuration, plusieurs formes d’azote sont présentes :
- Nitrites et nitrates: l’azote oxydé
- les formes non oxydées: l’azote Kjeldhal comprenant l’azote organique et l’azote ammoniacal (NH4+)
- L’azote organique ammonifiable
- L’azote organique réfractaire
La mesure de toutes les formes correspond à l’azote total.
Les eaux usées sont essentiellement constituées :
- d’azote organique ammonifiable ou réfractaire (sous forme soluble et particulaire)
- d’azote ammoniacal

Azote organique ammonifiable

C’est la forme la plus répandue et de l’azote ammoniacal (NH4-H). Effectivement, c’est celle présente dans les urines.
Les eaux usées qui entrent dans une station d’épuration renferment en grande partie d’azote organique (albumine, carbamide, etc.). De plus, l’azote rejeté par une habitation se trouve, à l’origine, légèrement plus concentrée en azote organique ammonifiable.
L’azote organique est dit ammonifiable lorsqu’il peut être transformé par hydrolyse enzymatique en azote ammoniacal.
En d’autres termes, le rapport ammonifiable / ammoniacal peut dépendre de certains facteurs comme la température et la durée d’incubation (dépendamment de la longueur du réseau) car c’est là que la transformation de l’azote organique en NH4-H débute.
Pendant le traitement en station d’épuration, l’ammonification continue jusqu’à transformation majoritaire de l’azote en NH4-N.
Azote réfractaire soluble et particulaire dite « Azote dur »
L’azote réfractaire soluble est l’élément non biodégradable dans l’azote. De plus, on détecte déjà cette partie à son entrée dans la station.
Par ailleurs, les ordres de grandeur de cet azote pour une eau urbaine standard sont compris entre 1,5 à 2,5 mg/litre. L’azote dur ou réfractaire particulaire affiche les mêmes concentrations mais celui-ci sera piégé dans les boues.
Dans certains cas, l’ordre de l’azote dur soluble peut être plus important. Cela s’explique généralement par les retours de la filière boue ou un réseau ayant un long temps de séjour.
Parmi les technologies qui impactent le taux d’azote organique dur, il y a les retours issus du séchage thermique.
Nitrification biologique
Il s’agit du cycle biologique de transformation des azotes réduits dans la forme oxydée nitrate (NO3-). Et les micro-organismes jouent un rôle majeur dans ce procédé.
La nitrification se fait en deux étapes :
- la transformation de l’ammoniac en nitrite par oxydation
- puis l’évolution du nitrite (NO2-) en nitrate (NO3-). On parle alors de nitritation puis de nitratation.
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MBBR N-XS
Traitement Biologique
Les micro-organismes responsables de la nitrification sont les Nitrosomonas et Nitrobacter. Ces derniers sont fragiles et requièrent une température constante (Supérieur ou égale à 12°).
Cependant, une alimentation en oxygène suffisante et un apport C/P/N favorable sont également indispensables.
Le taux de croissance maximum des bactéries nitrifiantes est nettement inférieur à celui des bactéries hétérotrophes (celles s’alimentant de substrat carboné). Dans une installation de traitement, la masse de bactéries nitrifiantes est directement liée à la quantité de substrat qu’elle reçoit et à la température de l’eau. La vitesse de croissance des populations nitrifiantes s’adapte plus ou moins rapidement à la masse d’azote à traiter.
La nitrification biologique d’1 kg d’azote ammoniacal :
- nécessite théoriquement 4,2 kg d’oxygène dont 80 % sont inclus dans les nitrates formés,
- s’accompagne d’une diminution de l’alcalinité (compensable par 3,9 kg de chaux vive CaO),
- produit 170 g de bactéries nitrifiantes ce qui est très faible vis-à-vis de la production de boues générées lors de la dégradation de la charge organique carbonée.
En résumé, pour garantir une bonne nitrification sans apport de produits chimiques complémentaires, il faut :
- De l’ammoniac
- Une température d’au moins 12°C
- Une alcalinité naturelle suffisante dans l’eau brute
- Beaucoup d’oxygène
- Suffisamment de bactéries nitrifiantes
- Un pH entre 7,2 et 8,5
Dénitrification biologique
Le but de la dénitrification biologique est d’éliminer complètement l’azote contenu dans l’eau usée. Lors de cette étape de traitement, l’azote s’évapore dans l’atmosphère sous sa forme moléculaire N2.
La dénitrification est le mécanisme anaérobie qui permet à un grand nombre de bactéries hétérotrophes de couvrir leurs besoins énergétiques à partir des nitrates lorsque l’oxygène dissous fait défaut.
Pour faire simple, puisqu’elles manquent d’O2, ces bactéries doivent utiliser l’oxygène contenu dans les nitrates pour respirer.
Effectivement, elles respirent des nitrates. Et pour garantir une bonne dénitrification, il faut donc éviter d’avoir de l’O2 dans les eaux à traiter.
Les bactéries qui interviennent dans le cycle de dénitrification participent également à l’altération du carbone. Comme elles mangent « équilibré », il leur faut une source de carbone pour compléter leur menu azoté. Sur les stations d’épuration, il est fréquent de rajouter un méthanol ou du vinaigre pour compenser les carences en carbone.
Un des autres avantages avec la dénitrification, c’est la récupération d’alcalinité (une partie de celle perdue à l’étape de nitrification). En effet, la dénitrification assure une restitution d’alcalinité égale à la moitié de la consommation nécessaire à la nitrification. c’est-à-dire que 1 kg d’azote nitrique dénitrifié équivaut à l’addition de 1,95 kg de chaux vive CaO.
Par ailleurs, il est intéressant de mettre en place un système de recirculation dans le processus de traitement de l’eau pour réutiliser cette alcalinité.
En résumé, pour garantir une bonne dénitrification, il faut :
- Des nitrates
- Pas d’oxygènes
- Suffisamment de bactéries dénitrifiantes
- Une source carbonée complémentaire facilement assimilable (il faut viser un rapport pollution carbonée DBO5 / NO3- minimal supérieur à 2).
Ratio DCO/NTK
Comme expliqué précédemment, les bactéries mangent équilibré. Le ratio DCO/NTK sert à mesurer cet équilibre.
Cependant, un faible rapport DCO/NTK a un impact négatif sur la biotransformation de l’azote en azote oxydé et gazeux. Autrement fit, ce type d’effluent ne peut pas favoriser une bonne dénitrification.
A contrario, un rapport élevé conduira à une assimilation totale de l’azote mais il y aura un résiduel de pollution carboné.
Pour une eau usée municipale, le rapport DCO/NTK est donc compris entre 7 et 20. C’est-à-dire que plus le ratio est faible et plus il faudra rajouter une source de carbone complémentaire lors de l’étape de dénitrification.
FAQ
Pourquoi faut-il éliminer l'azote dans les eaux usées ?
L’élimination de l’azote est essentielle car ses formes réduites (comme l’ammoniac) consomment l’oxygène dissous dans les milieux aquatiques, entraînant l’asphyxie de la faune et la prolifération d’algues (eutrophisation). De plus, les nitrates peuvent contaminer les nappes phréatiques et poser des risques pour la santé humaine. C’est pourquoi de nombreuses réglementations imposent des limites strictes aux concentrations d’azote dans les rejets d’eaux usées.
Quelle est la différence entre nitrification et dénitrification ?
La nitrification est un processus aérobie (avec oxygène) où l’azote ammoniacal est transformé en nitrites puis en nitrates par des bactéries spécifiques. En revanche, la dénitrification est un processus anaérobie (sans oxygène) durant lequel les bactéries utilisent les nitrates comme source d’oxygène, les réduisant en azote gazeux (N₂) qui est libéré dans l’atmosphère. Ces deux étapes sont complémentaires pour éliminer efficacement l’azote des eaux usées.
Quels sont les paramètres à surveiller pour optimiser la nitrification en station d’épuration ?
Pour garantir une nitrification efficace, il est crucial de maintenir :
- une température > 12 °C
- un pH entre 7,2 et 8,5
- une concentration suffisante en oxygène dissous
- une alcalinité naturelle ou corrigée
- une population active de bactéries nitrifiantes
Une mauvaise maîtrise de ces paramètres peut entraîner une nitrification incomplète ou instable.
Peut-on utiliser une seule étape pour éliminer l’azote dans une station d’épuration ?
Non, l’élimination complète de l’azote nécessite deux étapes biologiques distinctes : la nitrification (aérobie) pour transformer l’azote ammoniacal en nitrates, puis la dénitrification (anaérobie) pour transformer ces nitrates en azote gazeux. Il est impossible de tout traiter efficacement en une seule étape car les conditions de fonctionnement (avec ou sans oxygène) sont opposées.
Quelle est la norme de rejet pour l’azote total dans les eaux usées en France ?
En France, selon la directive européenne 91/271/CEE et l’arrêté du 21 juillet 2015, la concentration maximale autorisée en azote total dans les rejets des stations d’épuration dépend de la taille de la station (EH) et de la sensibilité du milieu récepteur. En général, pour les grandes stations (>10 000 EH), la limite est de 15 mg/L en azote total, ou parfois 10 mg/L pour les zones sensibles aux nitrates.