Les composés phosphorés des eaux usées: phosphore, orthophosphates

Quels sont les différents composées des eaux usées

Le phosphore n’est naturellement présent qu’en très faible quantité dans le sol et dans les eaux. Une concentration importante de phosphates peut entraîner la prolifération des algues qui est un élément nutritif pour les végétaux. Or, les algues sont responsables de l’eutrophisation des eaux stagnantes. Ce phénomène d’eutrophisation est alors plus ou moins important selon la teneur en phosphates dans les eaux usées. Cependant, le phosphore est le facteur limitant sur lequel il est possible de jouer efficacement pour réduire l’eutrophisation.

D’après une étude, 1g de phosphate-phosphore (PO4-P) peut provoquer une prolifération d’algues de 100g. Quand ces algues meurent, elles requièrent 150 g d’oxygènes environ pour se décomposer. Ce phénomène commence à de très faibles concentrations en P-PO4 :

  • de 0,1-0,2 mg/l en eau courante
  • de 0,005-0,01 mg/l en eau stagnante.

Les formes chimiques du phosphore dans les eaux usées sont très variées. Ils peuvent être solubles ou bien particulaires, minérales et organiques.

Phosphore Total = Phosphore particulaire + Phosphore dissous = Phosphore minéral + Phosphore organique

Afin de respecter les seuils recommandés, un processus d’élimination ciblé du phosphore est alors nécessaire dans les stations d’épuration. On met en oeuvre un processus qui peut être chimique ou biologique, et bien souvent les deux cas.

Orthophosphates et phosphore total

Les orthophosphates (ions PO4) sont la forme la plus simple et répandue des phosphates dans l’eau. Les phosphates (appelés orthophosphates) correspondent à une forme minérale oxydée du phosphore. Les phosphates se présentent sous forme dissoute, colloïdale ou solide.

Ces différentes formes des phosphates, issues du sel  d’acide orthophosphorique (H3 PO4), sont présentes dans les eaux car elles s’ionisent:

  • en H2 PO4-,
  • HPO4- -,
  • PO4- – –
L’orthophosphate est le composé le plus présent dans la charge totale en phosphate. En général, les orthophosphates sont rarement toxiques  vis-à-vis des poissons. Par ailleurs, on les utilisent en pisciculture afin d’augmenter la biomasse planctonique. Toutefois, ils peuvent favoriser l’eutrophisation lorsqu’ils sont présents en trop grande quantité.

La quantité de phosphates d’une eau se mesure en mg/l. de P-PO4. Mais le phosphore total est le paramètre le plus largement utilisé : il cumule l’ensemble du P. organique et du P. minéral. Il s’exprime en mg/l de Pt.

La différence entre le phosphore total et les orthophosphates permet de mesurer la fraction organique de phosphore dans l’eau.

Le processus d’épuration doit permettre l’élimination des composés phosphorés jusqu’à ce qu’ils arrivent aux limites légales autorisées à la sortie de la station d’épuration. Il existe deux méthodes pour le faire :

  • l’élimination biologique
  • Précipitation chimique des phosphates ou l’élimination chimique

Elimination biologique des composés phosphorés

Le principe de la déphosphatation biologique consiste en une suraccumulation de phosphore dans une biomasse. Si on obtient des teneurs de 2 à 3 % en phosphore dans les boues sous des conditions normales de dégradation d’un substrat organique, le mécanisme de suraccumulation nécessite de stresser la biomasse, alternativement en phase anaérobie (sans oxygène) et aérobie. Attention cependant, la zone de dénitrification, caractérisée par la présence d’oxygène via les nitrates, est donc assimilée à une zone aérobie, et ne permet pas la déphosphatation biologique.

Mis dans les conditions de stress (alternance des phases), les micro-organismes accumulent du phosphore, jusqu’à 10 % de leur poids sec, sous forme de granulés de polyphosphate.

Les réactions intervenant dans chaque zone peuvent être résumées ainsi :

  • zone anaérobie : les micro-organismes utilisent leurs réserves et relarguent du phosphore intracellulaire ;
  • zone aérobie : suraccumulation du phosphore sous forme de granulés de polyphosphate.

Ces phénomènes, indispensables au processus de déphosphatation biologique, vont conditionner la conception des filières de traitement. Le schéma de base devra comporter au moins :

  • une zone anaérobie où se produira le relargage du phosphore
  • une zone aérée où les réactions de sur-assimilation se réaliseront.

Pour obtenir une bonne déphosphatation biologique, l’élément essentiel est la présence d’une quantité suffisante de matières organiques facilement assimilables dans l’eau à traiter. À partir d’une eau usée urbaine classique, on obtient, en moyenne, un rapport de 3,5 % de phosphore éliminé par DBO5 consommée. Cela conduit à n’assurer par voie biologique qu’entre 50 et 65 % d’élimination du phosphore. Cette performance n’est souvent pas suffisante pour respecter les normes de rejet. Il faudra donc rajouter une étape de précipitation chimique où la part de phosphore restante sera précipitée par l’ajout de réactif.

L’élimination biologique n’est efficace que lorsque les éléments organiques facilement biodégradables (DBO5) sont présents en quantité suffisante.

Précipitation chimique des phosphates

Ce procédé tient compte de l’assimilation de la précipitation du phosphore soluble avec un composé de sel métallique. Il peut s’agir du sel de fer ou d’aluminium. Les sels de fer ou d’aluminium sont également capables de se combiner avec les ions phosphate pour former un précipité de phosphate de fer ou d’aluminium (Fe PO4 ou AIPO4). On parle de coagulation.

Du fait de la compétitivité des réactions de formation de précipités d’hydroxyde ou de phosphate, le rapport molaire à mettre en œuvre entre Fe/P ou Al/P varie de 1 à 3.

On réalise généralement la précipitation chimique dans des ouvrages dédiés à la décantation.

Les précipités de phosphates métalliques coulent et sont extraits dans les boues d’épuration.

L’ajout des coagulants peut se faire pendant la décantation primaire, ou une fois dans le bassin biologique, ou encore dans un ouvrage de traitement supplémentaire situé après le bassin biologique.

Par contre, il ne faut pas oublier que le niveau des boues augmente considérablement du fait de la précipitation des sels de phosphate. Pour limiter les coûts du traitement des boues et celui des coagulants, la plupart des stations d’épuration combinent les processus biologique et chimique d’élimination du phosphore.

Ratio DCO/Pt : Prédiction du rendement d’élimination du phosphore

Pour l’eau usée, on corrèle principalement les variations du rendement d’élimination du phosphore par assimilation seule :
  • au ratio DCO/P (ou DBO5/P)
  • à l’âge de boue
Le rendement d’élimination augmente de manière quasi-linéaire lorsque DCO/P augmente : la production de boue étant proportionnelle à la charge en DCO appliquée, une augmentation du flux de DCO pour un flux constant de P provoque une augmentation du flux de P assimilé et donc une meilleure élimination globale. De plus, un faible âge de boue permet d’améliorer le rendement sur le phosphore, tandis que les âges de boue très longs diminuent celui-ci. Pour un ratio médian DCO/P de 70 g DCO/g P, le rendement d’élimination peut être de :
  • 38 % avec un âge de boues de 20 j
  • 65 % avec un âge de boues de 2 j
La concentration en MES n’influe que faiblement sur le rendement d’élimination du phosphore. Plus la concentration est faible, meilleur sera le rendement. Dans les eaux usées, le ratio DCO/Pt normal est compris entre 25 et 100.
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